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Les propriétés biomédicales du maquillage des yeux dans l’ancienne Égypte

Bande-annonce du film CléopâtreBande-annonce du film Cléopâtre

par Patrick Clarke
traduit par Patrick Clarke et Frédéric Pinardon

Tout le monde connaît le maquillage noir des yeux des anciens Égyptiens. Toutefois, l’impression que les Égyptiens utilisaient la substance appelée “kohl” pour des besoins purement cosmétiques est fausse. Des données récentes nous fournissent une connaissance approfondie de cet aspect peu connu de la cosmétique égyptienne et de sa préparation. Diverses études scientifiques ont produit une analyse détaillée de la composition chimique des composants de l’oeil, et ont conclu que les anciens Égyptiens utilisaient des connaissances scientifiques empiriques.

D’anciens manuscrits égyptiens1 font la liste de remèdes pour des affections corporelles, et pour le sujet qui nous intéresse, pour des affections oculaires. Bien que les quantités spécifiques ne soient pas mentionnées, on peut raisonnablement supposer que l’ophtalmologiste égyptien connaissait la composition de chacune de ces prescriptions. Ci-dessous, une telle prescription, tirée du papyrus Hébert, est présentée avec sa traduction.2

Figure 1. Le papyrus Ebers (colonne 61, lignes 6 à 8). Clé : 1) Translittération des hiéroglyphes, 2) Traduction littérale, 3) Traduction français courant.

La méthode de fabrication ancienne et moderne

Des tests sur le contenu d’articles de cosmétique conservés au Musée du Louvre indiquent que le produit était en très bon état de conservation.3 La diffraction à rayons X de poudre au synchrotron de l’ASRF (European Synchrotron Radiation Facility) a permis de découvrir les constituants minéraux des cosmétiques égyptiens. En tout, ce sont 49 des échantillons qui furent analysés, révélant la présence de quatre sortes de plomb : la galène (PbS) pour le brillant noir et trois sortes de blanc : la cérusite (PbCO3), la phosgénite (Pb2Cl2CO3), et la laurionite (Pb(OH)Cl). On peut trouver les deux premiers composés dans la nature, ils étaient liés dans une émulsion faite de graisses animales (voir la section sur le papyrus Ebers plus loin), mais ce qui a surpris les scientifiques était la présence de deux composés naturellement très rares, la laurionite et la phosgénite.

Il est probable que ces deux composés se soient formés par altération chimique s’ils sont entrés en contact avec des eaux carbonées et chlorées. Il n’y a toutefois aucune indication que de telles altérations se soient produites et la conclusion logique est donc que les Égyptiens ont fabriqué délibérément les deux composés en utilisant des réactions chimiques simples, mais délicates.4

Une explication simplifiée de la méthode indique néanmoins le haut niveau de compétence des Égyptiens. L’oxyde de plomb était réduit en poudre fine. Celle-ci était mélangée avec de l’eau, du chlorure de sodium et parfois du natron (Na2CO3 : carbonate naturel hydraté de sodium cristallisé). Pour éviter la production d’hydroxydes de plomb non désirés, il fallait prêter une attention particulière au niveau de pH : cela nécessitait un filtrage fréquent et le changement du liquide surnageant avec de l’eau fraîche et du sel (NaCl). On pense que le processus pouvait prendre jusqu’à 30 jours, après lesquels la litharge (oxyde naturel de plomb) était déployée; il restait alors un résidu blanc. Une équipe de scientifiques a répliqué exactement cette méthode en laboratoire et a bien observé cette précipitation des chlorures de plomb.5 Les chercheurs ont noté dans leur expérience que, quand l’oxyde de plomb était mélangé vigoureusement avec du sel gemme (et aussi du natron dans d’autres tests) dans de l’eau chaude, ils obtenaient les résultats suivants :

PbO + H2O + NaCL → Pb(OH)Cl + NaOH (1)

PbO + H2O + NaCL + 1/2 Na2CO3 → 1/2 Pb2Cl2CO3 + 2 NaOH (2)

Les précipités résultants étaient ensuite incorporés dans une large gamme de produits thérapeutiques; on mélangeait les composés avec différents agents d’émulsion tels que des graisses animales ou de l’huile végétale, une pratique assez proche des procédés pharmaceutiques modernes.

Comment fonctionnent les préparations ophtalmologiques

Des études sur les réponses immunologiques aux infections bactériennes ont montré que l’oxyde nitrique (ON) agit comme un messager vital dans le système immunitaire. L’ON signale l’infection à une multitude de cellules immunitaires, y compris les macrophages,6 et favorise une augmentation du flux sanguin dans les capillaires, ce qui augmente significativement le nombre de phagocytes. Un litre de sang humain contient environ 6 milliards de phagocytes.7 C’est là une preuve accablante de conception intelligente par un créateur bienveillant. L’utilisation de microélectrodes pour enregistrer les réponses au stress des kératinocytes (cellules de la peau) a permis de découvrir que des concentrations d’ions Pb2+ sous-micromolaires (inférieures à la micromole) suffisaient à obtenir une réponse spécifique au stress oxydatif. Au moment où une solution micromolaire d’acétate de plomb est introduite près d’un kératinocyte, la cellule libère une réponse oxydative qui dure environ 30 minutes. L’effet le plus significatif qui fut relevé est une augmentation de la production d’ON de 240 % quand la laurionite est présente.

À cause de la variabilité des cellules, les propriétés cinétiques du produit varient, toutefois l’étude5 a conclu que la réponse augmentait en proportion directe de la concentration en Pb2+ :

“Il fut observé que Pb2+ ne réduisait aucun changement significatif dans la production normale d’ions super oxyde, mais qu’elle conduisait à une production augmentée (~240 % pour 0.2 μM Pb2+) et plus longue d’ON°”.5,6,7,8

Les anciens étaient intelligents

La pensée générale croyant que l’intelligence humaine (contrairement à l’avancée technologique, qui repose sur la transmission et l’accumulation des découvertes) a évolué vers le haut conduit à une tendance à minimiser les réussites des anciens. C’est ce qui semble s’être produit avec les scientifiques impliqués dans cet article de “Analytical Chemistry”. Ils ont écrit :

“Le composé laurionite était réel et efficace, malgré le fait que ses implications ‘magiques’ semblent a priori totalement irréconciliables avec nos vues scientifiques modernes…”.9

Quand ils disent “nos vues scientifiques modernes”, il faut comprendre “science évolutionniste et matérialisme / naturalisme”. Les anciens Égyptiens auraient réfuté l’idée qu’en dehors du monde naturel il n’y a rien. Dans leur vision du monde, le naturel et le spirituel sont non seulement réels, mais ils coexistent mutuellement et sont codépendants. De même :

“On ne peut bien sûr pas aller jusqu’à dire que la laurionite était introduite à dessein dans la composition du maquillage pour ses propriétés antibactériennes reconnues.”

La question évidente est “et pourquoi pas ?” Qu’ils sachent ou non que l’existence des microbes était la cause des maladies, pourquoi n’aurait-il pas compris que ces composés, à partir d’observations cliniques empiriques, avaient un effet thérapeutique sur certaines affections ? Cela reflète une autre erreur grave et courante : la tentative de superposer des idées culturelles du 21e siècle sur des cultures disparues depuis des milliers d’années. La vision du monde des anciens était très différente de celle de l’homme moderne. Les Égyptiens étaient généralement un peuple prudent et ses composés apparaissent très tôt dans l’histoire archéologique sans aucune étape de développement.

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Figure 2. Décors en faïence du petit palais de Ramsès III. Gauche à droite : Libyen, Nubien, Syrien, Bédouin Shasu et Hittite.

On voit encore une fois que la croyance en l’évolution a la capacité de bloquer notre compréhension dans ce domaine de l’histoire des sciences. Les preuves indiquent en général que l’homme ancien était au moins aussi intelligent que son homologue moderne. Les Égyptiens étaient compétents dans toutes sortes de technologies. Cela inclut les technologies du métal, la peinture avec des pigments micronisés, le tissage de tissus si fin qu’il était virtuellement transparent et, bien sûr, les technologies de la construction (les pyramides).

La technique égyptienne du maquillage des yeux était-elle limitée à Kemet (l’ancienne Égypte) ? Apparemment pas. Au palais royal de Ramsès III à Medinet Habu, Louxor, des morceaux de faïence montrent certains ennemis de Ramsès dans leur costume traditionnel (figure 2). Notez l’attention aux détails employés par les artistes égyptiens; les cinq personnages sont correctement représentés dans leur habit national (de gauche à droite : Libyen, Nubien, Syrien, Bédouin et Hittite). Ce qui est particulièrement intéressant est que tous ces personnages, représentants des peuples de tout le Proche-Orient ancien jusqu’au sud de l’Afrique, portaient un maquillage noir autour des yeux tout comme leurs homologues égyptiens. Cela suggère que cette technique était plus répandue que pensé précédemment.

D’un point de vue créationniste, Adam fut créé parfait, et dès la seconde génération, ses descendants se sont engagés dans des technologies telles que la métallurgie ou la production d’instruments de musique (Genèse 4:21–22). De telles technologies requéraient un haut niveau d’intelligence. Dans certains domaines et dans certaines cultures, l’archéologie a montré qu’il y avait eu perte, et non gain, dans les connaissances technologiques.10 La science à l’origine de la fabrication et de l’application du maquillage des yeux chez les Égyptiens s’accorde bien avec l’histoire biblique des origines de l’humanité.

Références et notes

  1. Seulement un de ces manuscrits est cité ici : les pEbers. En ce qui concerne l’âge des pEbers, certains indices semblent confirmer l’antiquité de ces textes. Les colonnes 103–110, qui furent écrites au verso, sont dans un style de langage différent comparé au reste du papyrus. Alors que l’écriture manuscrite est la même, on détecte des dialectes différents. Bien que le style d’écriture semble dater d’au moins 1600 ans avant J.-C. selon la chronologie conventionnelle, l’usage idiomatique indique que le texte appartient à une période plus ancienne et que certaines sections des pEbers peuvent être datées des premières dynasties pharaoniques. Retour au texte.
  2. Immédiatement avant cette prescription dans les pEbers, il y a une recette plus complexe et un remède contre la conjonctivite. Retour au texte.
  3. European Synchrotron Radiation Facility (ESRF), Newsletter, avril 1999, p. 10. Retour au texte.
  4. Walter, P., et colll., Making make-up in ancient Egypt, Nature 397(6719):483–484, 11 février 1999. Retour au texte.
  5. Tapsoba, I., Arbault, S., Walter, P. and Amatore, C., Finding out Egyptian gods’ secret using analytical chemistry: biomedical properties of Egyptian black makeup revealed by amperometry at single cells, Analytical Chemistry 82(2):457–460, 15 January 2010; p. 458. Retour au texte.
  6. Ces grandes cellules “mangent” les organismes envahisseurs en les engloutissant. Du grec “macro” (grand) et “cytos” (cellule). Elles sont le seul type de cellules immunitaires à faire cela, incluant les monocytes, les neutrophiles, les cellules du tissu dendritique et les mastocytes. Elles sont appelées collectivement “phagocytes”, du grec “phagein” (manger). Retour au texte.
  7. Hoffbrand, A., Pettit, J.E. and Moss, P.A.H., Essential Haematology (4th ed.), Blackwell Science, London, p. 331, 2001. Retour au texte.
  8. Supporting information for Tapsoba et coll., ref. 5, disponible gratuitement de pubs.acs.org/doi/suppl/10.1021/ac902348g/suppl_file/ac902348g_si_001.pdf. Retour au texte.
  9. Tapsoba et coll., ref. 5, p. 460. Retour au texte.
  10. Pour référence, voir Wieland, C., Modern ‘Stone Age’ reconsidered, Creation 15(4):51, 1993; creation.com/tech-loss, et aussi creation.com/culture-clash. Retour au texte.

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